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Mais depuis deux ans, le contexte a évolué, encouragé par la réévaluation à la hausse des tarifs de rachat de l'électricité décidée par l'Etat en juillet 2006. Si la méthanisation ne peut constituer qu'une part faible de l'énergie d'origine renouvelable produite en France - la méthanisation ne constitue que 0,5 % de la consommation d'énergie danoise malgré un développement important du procédé dans le pays - elle a néanmoins une place à jouer dans le bouquet énergétique français à l'avenir. Car au-delà de la production de chaleur et d'électricité, la méthanisation permet de trouver des débouchés à des déchets qui ne trouvent plus leur place dans le schéma du traitement français, d'après Olivier Théobald, du département Gestion optimisée des déchets de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME). Malgré tout, certains freins au développement d'une telle filière persistent. Parmi eux, la question de la rentabilité économique des installations mais aussi des procédures administratives complexes…
La valorisation énergétique des déchets
Depuis quelques années, la méthanisation suscite un vif intérêt chez les producteurs de déchets, qu'ils soient agriculteurs, industriels de l'agro alimentaire ou collectivités territoriales. Le procédé permet en effet d'optimiser cette ressource, qui souvent ne trouve pas de débouchés, en produisant de l'électricité, de la chaleur ou encore du carburant.
Phénomène naturel dans les marais, les sédiments mais aussi dans les intestins de certains animaux, la bio méthanisation, ou digestion anaérobie, est la transformation de la matière organique en biogaz (méthane et gaz carbonique principalement) par une communauté microbienne qui fonctionne en absence d'oxygène. La technologie s'est inspirée de ces phénomènes naturels pour produire du biogaz à grande échelle à partir de déchets ménagers, agricoles ou industriels. Brûlé, le biogaz obtenu peut produire de l'électricité et/ou de la chaleur. Epuré, il peut être utilisé comme carburant par les voitures fonctionnant au gaz naturel voire injecté dans le réseau de gaz naturel. Le résidu de fermentation, ou digestat, une fois traité, peut-être utilisé par l'agriculture ou pour la fabrication de produits organiques. La valorisation énergétique du biogaz permet d'exploiter le potentiel énergétique de la matière organique, tout en assurant, par la méthanisation, les fonctions de traitement et de retour au sol, résume Sandrine Wenisch de l'ADEME.
Outre l'optimisation des déchets, la méthanisation permet de réduire leur impact sur l'effet de serre. Par exemple, ce procédé produirait en moyenne trois fois moins de CO2 qu'une fermentation anaérobie classique, comme l'épandage des déchets agricoles.
Optimiser la valorisation énergétique
Pour autant, les différents modes de valorisation énergétique du biogaz de méthanisation ne sont pas égaux quant à leurs bénéfices environnementaux. Tout dépend du choix du mode de valorisation énergétique (production d'électricité seule ou cogénération), des filières substituées de production d'énergie et de l'efficacité de la technologie utilisée. Ainsi, la cogénération (production de chaleur et d'électricité) est plus intéressante que la production seule d'électricité du fait d'un rendement global plus élevé de l'installation. Il est important également qu'une majeure partie de la chaleur produite soit valorisée dans un réseau de chaleur, ce qui reste la plupart du temps difficile, les besoins de chaleur étant majoritairement saisonniers. La qualité des substrats traités entre également en ligne de compte. La graisse animale produit par exemple davantage de biogaz que les végétaux. Il est donc nécessaire, en amont du projet, de prendre en compte le contexte global (implantation à proximité d'un réseau de chaleur ou de gaz naturel, la substitution énergétique, la qualité de substrats traités) afin d'utiliser à son maximum le biogaz produit et de rendre l'installation efficiente d'un point de vue environnemental et économique.
Les freins au développement de la méthanisation
Car le défaut de rentabilité économique constitue aujourd'hui l'un des principaux freins aux investissements dans la méthanisation. L'accès à un gisement de déchets pérenne, la valorisation de l'énergie produite (raccordement au réseau électrique, de gaz naturel ou de chaleur) ou la question des débouchés pour le digestat produit sont d'autres obstacles que rencontrent la plupart des projets de méthanisation développés aujourd'hui en France. Afin de limiter ces obstacles, de plus en plus souvent, différents acteurs (collectivités, industriels et agriculteurs) s'associent autour d'un même projet. Mais alors d'autres barrières s'élèvent ! Les installations de méthanisation sont en effet soumises aux autorisations relatives aux installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE). Selon Alain Femenias, du Conseil général de l'environnement et du développement durable, cette année, une nouvelle nomenclature ICPE se prépare concernant les installations de méthanisation. Ce dernier est l'auteur d'un rapport sur les conditions de développement d'une filière de méthanisation « à la ferme ». Celui-ci préconise des actions d'accompagnement des porteurs de projets ainsi qu'une meilleure adaptation de la réglementation et des procédures administratives pour favoriser le développement d'une telle filière et suivre l'exemple de nos voisins nord européens.